Il ne voulait pas que j’en parle…
C’est qu’il aime rester discret aux yeux des autres.
Omniprésent mais discret quoi. C’est sa technique, estampillée fourbasse de catégorie 1.
Parce que si on en dit trop sur lui, il pourrait perdre de son influence.
Et influent il l’est…
Il s’arrange pour que chaque défi paraisse insurmontable, chaque réussite un coup de chance et chaque compliment une erreur qui met mal à l’aise.
Oui, il pousse le bouchon un peu trop loin. C’est pour ça que je l’ai appelé Maurice* : Maurice le syndrome de l’imposteur.
Alors, aujourd’hui malgré ses très fortes protestations (« Sérieux t’as quoi à dire à mon sujet ?… Pis t’es qui pour parler de moi ? Tu n’y connais rien, vas d’abord lire 72 articles avant ? Et où sont tes diplômes en Sciences du syndrome de l’imposteur, hein hein ?! ») je vais te parler du Syndrome de l’Imposteur aka Maurice.
A quoi ressemble Maurice ? D’où vient-il ? De quoi se nourrit-il ? Est-ce une bonne idée d’avoir un Maurice chez soi, sur son blog et dans son business ? Comment l’envoyer en vacances dans un lieu de rêve, loin, très loin, et pour toujours ?
C’est ce que nous allons voir tout de suite.
Avant de commencer, je voudrais te rassurer : je ne crois pas vraiment que nous sommes plusieurs dans ma tête. Nous en avons discuté et nous sommes tous d’accord là-dessus.
Le syndrome de l’imposteur : qu’est-que c’est ?
Le « syndrome de l’imposteur » est un terme inventé par 2 psychologues en 1978, mais il paraît qu’elles regrettent d’avoir choisi le mot « syndrome » qui laisse penser à une maladie alors qu’au moins 70% des gens connaissent ça un jour dans leur vie. (Maurice a tenu a ce qu’on ait des données scientifiques et rationnelles pour cet article, même si on les a chopées sur Wikipédia).
Ce nom désigne donc cette capacité, assez incroyable il faut l’avouer, à rejeter le mérite de nos réussites sur des éléments extérieurs à nous. Alors que tout échec (même aussi petit et mignon qu’un bébé chat) nous revient exclusivement. Bien entendu.
(Maurice tient à préciser qu’il est farouchement opposé à la publication de ce dessin)
Maurice aime insuffler le doute et l’illégitimité dès qu’on a des résultats ou une opportunité de résultats.
Personnellement, il m’a suivi pendant des années.
Jusqu’à récemment, il s’est exprimé à chaque fois qu’on m’a fait un compliment, demandé un conseil, proposé un job, un contrat, une intervention quelconque…
Il m’a dit des choses merveilleuses de gentillesse, toujours de circonstances. Par exemple :
- Une proposition intéressante ? : « T’es pas à la hauteur » , « Tu vas te planter graaaave » , « Tu es qui pour parler de ça ? Laisse le boulot aux gens qui ont des trucs à dire«
- Un compliment ? : « S’ils savaient vraiment… » , « A un moment il y en a bien un qui va s’en rendre compte » , « You’re a total fraud » (oui Maurice parle même anglais quand ça claque mieux).
- Une réussite ? : « C’était un coup de chance » , « Oui mais les circonstances faisaient que c’était facile » , « Vu le travail investit c’est sûr que ça a marché mais les gens vraiment doués n’ont pas besoin de travailler autant » , « En même temps tu as des facilités là-dessus, pas vraiment de mérite » , « Et puis en fait c’est pas vraiment un super réussite, y en a d’autres qui font mieux«
Note au passage comme Maurice est un tyran impossible à satisfaire : Si c’est dur, c’est que t’es pas douée. Si t’es douée, tu n’as pas de mérite.
Tu peux penser qu’avec des preuves de légitimité, des chiffres, du concret, des diplômes, des retours extérieurs, ça va le calmer. Mais non parce qu’en réalité, rien ne peut satisfaire Maurice. Il trouvera toujours une raison de te dire que tu es en train de tromper les gens, que tu n’es pas légitime, que tu n’y arriveras pas.
Il est comme un môme qui a peur du noir… tu peux lui dire rationnellement que tout va bien, lui montrer qu’il n’y a pas de sorcière dans le placard et que la pièce est la même avec et sans lumière… Il flippe quand même.
D’où vient-il ce Maurice ?
Le syndrome de l’imposteur n’est donc pas rationnel. Il est né de la peur et il se nourrit de la peur. Si la peur était rationnelle ça se saurait.
Il n’est pas non plus une petite partie de toi détestable qui est là juste pour te pourrir la vie.
Maurice c’est juste un formidable outil de résistance au changement.
Au fond de nous il y a une partie qui flippe sa maman dès qu’il s’agit de changer quelque chose. Une partie vachement puissante qui réfléchit assez basiquement en mode : « On a fait comme ça et on était en vie, on veut rester en vie donc on va continuer à faire ça ».
Oui, on a toutes une vieille réac en nous. Une vieille réac qui s’est installée là dès notre plus tendre enfance et qui fait tout pour nous protéger à sa façon. Ce qui veut parfois dire envoyer Maurice pour qu’on ne bouge pas trop.
Et cette vieille réac a d’autres outils sous la main, je t’en ai déjà parlé dans cet article sur la procrastination.
Toujours est-il que le syndrome de l’imposteur c’est un bon moyen pour ne pas se lancer dans quelque chose et ne pas avancer (ou pas trop vite).
Maurice, c’est un moyen de te protéger, pas (juste) un vilain emmerdeur.
Le syndrome de l’imposteur dans ton business et ta communication
Tu l’auras compris, avoir Maurice sur le dos trop souvent et lui prêter plus d’attention qu’il ne mérite c’est gênant. Surtout quand tu as une entreprise et/ou que tu communiques en ligne.
En plus de te faire te sentir illégitime et passer ton temps à douter et te trouver nulle, Maurice peut t’amener à :
- Dépenser beaucoup de temps et d’énergie à en faire trop pour compenser ce sentiment d’illégitimité (et avoir une bonne raison extérieure à toi en cas de réussite, « Bof ouais j’ai bossé quoi c’est tout »). La perfectionnite est la BFF de Maurice.
- Au contraire, t’auto-saboter pour lui donner raison.
- Dépenser aussi beaucoup de temps et d’énergie à te comparer, y compris à des gens qui ne jouent pas dans la même catégorie que toi (Oui parce que si tu étais vraiment bonne, tu arriverais à envoyer cette balle aussi loin que Tiger Woods, même si tu es débutante… et que tu joue au tennis de table).
- Pratiquer des prix trop bas par rapport à la valeur réelle de ce que tu offres.
- Te minimiser dans tes communications pro (une vidéo à ce sujet) et du coup faire des pages de ventes en mode « nan mais n’achetez pas en fait c’est pas si génial« .
- Refuser des opportunités.
- Ne pas réussir à te rendre visible par peur du regard des autres, de la critique éventuelle etc.
- Ne pas oser demander de l’aide, suivre une formation, se faire accompagner parce que ça pourrait donner l’impression que tu n’es pas à la hauteur
- …
Je ne recommande donc pas d’adopter un Maurice quand on est à son compte, sous peine de passer à côté d’opportunités, de visibilité, de chiffres d’affaire et de kif.
Malheureusement, il s’impose généralement de lui-même surtout quand on est femme (des siècles de domination et de muselage, en voilà un terreau fertile), autodidacte (pas de diplômes quelle aubaine !), multipotentielle (pas d’expertise de 15 ans, youpi) ou débutante dans son activité (pas encore de résultats mwhahaha).
Comment diminuer le syndrome de l’imposteur (et mettre Maurice à la retraite)
Alors du coup, comment qu’on s’en débarrasse de cet ami qui nous veut du bien mais qui nous embête beaucoup ?
Déjà on en prend conscience, on le repère à l’oeuvre, on le remercie mais on lui dit qu’il peut partir en vacances en fait. Il a bien bossé, on est grande on peut se débrouiller sans lui maintenant (et non on deviendra pas une connasse imbue de sa personne qui écrase les autres). Va Maurice, pars loin et ne reviens pas.
Et concrètement, dans la vraie vie :
- Ne te flagelle pas en mode « J’ai laissé un Maurice s’installer chez moi, j’suis vraiment trop nulle« . Maurice est une fourbasse bien intentionnée qui t’a été utile à un moment et qui squatte chez beaucoup de monde (cherche « Stars with impostor syndrome » sur Google tu verras).
- Trouve un petit nom pas très sérieux à ton Maurice, tu verras ça aide à moins croire tout ce qu’il raconte.
- Apprends à voir ces fameux facteurs de « chance » qui amenuisent le succès à tes yeux comme ta fabuleuse compétence à saisir ces opportunités.
- Crois les autres quand ils disent du bien de toi… Si tu penses qu’ils sont si merveilleux quand ils font des choses, pourquoi seraient-ils moins merveilleux quand ils « jugent » ce que toi tu fais ? OK ils ne sont pas dans ta tête et tes coulisses, mais tu n’es pas dans les leurs non plus. Alors pas de comparaison et acceptation des compliments.
- Reviens toujours aux faits : pas d’interprétations biaisées de tes résultats, de tes compétences ou de ta soit-disant valeur… des faits que tu peux partager de manière transparente. Si tu fais de grandes promesses pas vraiment tenables parce qu’un guru du marketing t’a appris que c’est ce qu’il fallait faire, Maurice va adorer te tenir éveillée la nuit. Dis franchement où tu en es, ce que tu as accompli. C’est quand même une excellente base pour commencer une relation.
- Accepte que l’échec fait parti du chemin (et qu’on y passe toutes !)
- Enfin, c’est pas pour imiter ce livre de Jen Sincero (que je te recommande) mais aimes-toi. Je crois que le secret est là (et si c’est trop difficile au début tu peux juste t’écouter et t’estimer un peu).
Si toi aussi tu as un Maurice chez toi, viens partager ton expérience et tes techniques pour le mettre à la retraite en commentaires 😉
* Si tu ne comprends pas la référence à Maurice c’est ici. Ne me dis pas ton âge, je sens que ça va me filer un coup de vieux.
Ouhhh comme ça me parle ! Merci de partager, ça aide aussi à maîtriser Maurice. Je suis bien d’accord avec toi : s’aimer, au moins un peu, fait bien avancer ds la course contre le sentiment d’imposture. Merci Cécile pour cet article très réconfortant.
Merci pour ton partage Cécile. Je n’ai pas l’habitude de laisser des commentaires, même quand j’apprécie beaucoup un article de blog. Mais là je voulais juste te dire que je trouve que tu as bien fait d’envoyer Maurice en vacances ! Je crois savoir que vous débattiez depuis un moment 🙂 Ton article est rassurant, très drôle et hyper juste. Tes dessins sont géniaux ! Merci 😉
Très parlant effectivement ! Je crois que ça fait environ 5 ans que je voulais ouvrir mon blog, et ma Josiane personnelle ne me lachait pas la grappe (j’adore l’idée de lui donner un nom). Je l’ai un peu faite taire dernièrement, et ça me fait le plus grand bien. Je vais tâcher de continuer pour la suite, même si elle a le don de se pointer toujours quand ça va pas (je me rends compte que je lui prête un peu les traits de mes parents … un jour, je me paierai une thérapie XD). Mais bon, au fur et à mesure, j’ai les outils (et les personnes) sous la main pour lui faire fermer sa grande bouche ! Namého ! XD
Hop, à la niche Maurice! Merci Cécile.:)
Ah ah, le “ouais j ai bossé quoi” pas de quoi fouetter un chat … et aussi “nan, mais j’ai juste rencontré la bonne personne au bon moment” et j ai eu la chance qu’elle soit suffisamment naïve pour me faire confiance, comme ça, au premier coup d’oeil, rien à voir avec mes compétences, quoi…
j ai pas encore réussi à lui donner un gros coup de pied aux fesses mais déjà quelques baffes.. 🙂
C est un début, non?
Il tombe à point cet article!!! Et cet humour… je suis fan
« Avant de commencer, je voudrais te rassurer : je ne crois pas vraiment que nous sommes plusieurs dans ma tête. Nous en avons discuté et nous sommes tous d’accord là-dessus. » : c’est à mourrir de rire !!
« nan mais n’achetez pas en fait c’est pas si génial« : c’est exactement ce que j’ai fait la semaine dernière avec une copine qui me posait des questions sur mon ebook :/
Non mais je progresse quand même, grâce à l’atelier ! Comme dit Laurence, je ne l’ai pas mis KO, juste quelques baffes ^^
Cet article me parle tellement!
Je me souviens qu’il y a tout juste l’année dernière, un gars me disait que c’était balèze de savoir créer des sites web et je lui ai répondu « Oh, mais non, je suis sûre qu’avec les bons outils, tu y arriverais, toi aussi, c’est facile! »
Parfois, je crois avoir dépassé ce syndrome, mais je me rends compte des miettes qu’il reste dans la façon dont je réponds aux gens!
Sinon, en plus de donner un nom à ma cher ego (elle s’appelle Aïleen), je lui visualise également une apparence! Comme ça, ça m’aide à dire que ce n’est pas moi, c’est mon ego!
J’adore l’intro avec la réunion de tes plusieurs toi, haha!
C’est rigolo, dans un de mes derniers billets, j’ai parlé aussi du syndrome de l’imposteur et de la manière de le combattre. Je n’aurais jamais pensé à lui donner un petit nom, c’est trop drôle !
Très chouette article, je vais faire un lien dans mon billet 🙂
Bonjour Cécile, encore un article très intéressant. Ah le syndrome de l’imposteur… le vilain Maurice est partout ! Pas évident de lui claquer la porte au nez et de l’ignorer.
Il y a une petite partie de lui que je trouve tout de même utile, car la remise en question est essentielle, quel que soit le métier que l’on exerce. Par contre, il ne faut pas le laisser prendre toute la place au risque de plus rien faire du tout.
Pas plus tard qu’hier, Maurice était là, toute la journée et bien sûr lorsque j’ai reçu un retour négatif de la part d’un client (le premier depuis le début de ma jeune carrière), c’est un peu comme s’il me disait « ah tu vois que tu n’as pas le niveau ! ». Histoire de bieeeen enfoncer le couteau.
Et aujourd’hui est un autre jour… J’ai foutu Maurice à la porte et je lui ai dit d’aller se faire voir avec ses sales idées ! Alors à chaque jour son combat. Je t’aurais un jour Maurice, je t’aurai 😉
Ouh là, je le connais bien Maurice! Il est très envahissant et bien bavard…. Merci pour cet article!
@Françoise : Merci de ton retour 🙂
@Jennifer : Merci !! Oui on en a parlé un moment avant que je trouve les arguments pour le convaincre ce Maurice ^^
@Amélie : Josiane c’est magnifique !! Bien sûr que tout ça c’est la faute de nos parents hein (ah ah) mais on fait notre vie maintenant.
@Ilhem : Avec plaisir, il est à la plage là le Maurice.
@Laurence : C’est jamais grâce à nous mais toujours à cause de nous si on l’écoute. Par contre je ne suis pas pour les baffes, parce qu’en fait Maurice c’est une partie de nous et en plus une partie qui a peur et veut nous protéger (il fait ça très mal on est d’accord), la gentillesse fonctionne mieux du coup. « Merci mais au revoir maintenant »
@Flo : Chouette, merci !
@Maud : Merci de ton retour ! 🙂 Comme pour Laurence soit sympa avec ton Maurice c’est comme un grand enfant qui fait le boulot qu’on lui a demandé.
@Aline : Parfois il y a la modestie aussi quand on est en public. Pas toujours qu’on se croit « pas si génial que ça » mais on pense (on nous a appris) que ça fait mauvais genre de dire que oui ce qu’on a fait été plutôt génial en fait. C’est bien vu de se diminuer plutôt que de dire simplement merci…
@Lynda : Merci beaucoup !
@Marie : C’est clair qu’il est utile pour certaines choses. Comme tous nos mécanismes +/- inconscients il nous protège de trucs dont on croit qu’ils sont dangereux (toujours inconsciemment).
@Maya : Avec plaisir
Allez je m’en vais dire à Maurice de se dorer la pilule à l’île Maurice (wouhou humour!). Il aime bien se mettre dans mon dos et épier mes moindres faits et gestes.
Mais quand je vois que ce sournois a même réussi à squatter chez Serena Williams et Emma Watson (et qu’elles l’ont renvoyé à coup de raquettes et de sortilèges), alors, je vais le renvoyer aussi.
Merci Cécile, merci….
Maurice à l’île Maurice ah ah ah ! Bon plan !!
Il ne faut pas truquer des photos de moi de façon ignoble comme dans mes cauchemars
Merci pour ce partage et cette prise de conscience qui s’est révélée chez moi.
J’ai donc moi aussi un bon vieux Maurice et mon plus triste constat c’est que j’entends avec effroi ses « gros mots » raisonner à haute voix dans la petite bouche innocente de ma fille du haut de ses 8 ans…
Je ne trouve pas les « bons, beaux » mots pour contrer ceux de son Maurice en herbe (et qui pourraient servir à fermer le clapet du miens!) mais je me dis peut être que donner une « maman » à Maurice serait possiblement une piste.
Une maman qui rassure, qui a confiance, et qui saurait avoir les mots justes (ou me serait ce que pour lui apprendre à dire simplement merci lorsqu’on reçoit un compliment).
C’est l’une des rares fois où je poste un commentaire précisément parce mon Maurice me dit que je ne suis pas légitime à le faire, mais voilà. (T’inquiète Maurice ça va bien (se) passer!)
Hello Cécile, merci beaucoup pour cet article. Ca fait un bout de temps que je souhaite lancer une offre de conseil webmarketing par téléphone, mais ce satané Maurice est bien présent. Tu as raison, il faut se lancer et dédramatiser l’échec !